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lundi 10 septembre 2012

Redressement intellectuel et moral : Luc Chatel vs. Vincent Peillon : un à zéro, la faute à Pétain ?



Vincent Peillon, le ci-devant ministre français de l'Éducation Nationale, est quoi déjà ?, agrégé ou docteur en philo... logie ? En grec, "philos", "logos", ça veut dire "amour du discours", ou de la parlotte ? Je ne sais pas ce qu'ils ont, mais les ministres de ce gouvernement adorent s'écouter parler. C'est simple : il ne se passe pas une journée sans qu'une bonne escouade d'entre eux se retrouvent dans les divers studios de radio et de télévision, à croire qu'ils n'ont que ça à faire : causer dans le poste, ou dans les médias ? Et sur ce plan, le changement, ce n'est vraiment pas maintenant !

Par parenthèse, j'étais en Allemagne lors de l'arrivée à la chancellerie d'Helmut Kohl, et je crois pouvoir affirmer que les apparitions de Kohl dans les studios de radio ou de télévision pouvaient se compter sur un ou deux doigt(s) d'une main par an (ex. le 31 décembre au soir). Et la règle est toujours d'actualité aujourd'hui, sous Angela Merkel. 

Et pendant ce temps, en France... Il faut dire qu'en Allemagne, il n'y a pas tous ces sondages de popularité...

Voyez le fraîchement élu Roi de France : les sondages sont mauvais ? Vite, vite, il faut réagir : samedi, il cause dans Le Monde, et comme, apparemment, il n'y a pas dit grand chose, voilà qu'il remet ça le lendemain (dimanche) sur TF1, et dans deux jours, voire moins, vous le verrez en déplacement ici ou là, et à raison de deux ou trois déplacements par semaine, avec les reportages qui vont avec, le successeur de l'autre agité nous rejoue le coup de l'omniprésence médiatique.

Comme quoi !

Mais j'étais parti pour parler de Vincent Peillon et de sa fameuse phrase sur le "redressement intellectuel et moral", formule piquée à Philippe Pétain (25 juin 1940), ainsi que Luc Chatel l'a judicieusement relevé. Et là, on dit à Chatel : "Bien joué !", et tant pis pour Peillon le bizuth, le bleu, le néophyte. Quand je pense que les ministres sont bardés de dizaines de conseillers, tous plus bardés de diplômes les uns que les autres ! Quelle bévue !

Alors, évidemment, tout le Landerneau allait se focaliser sur la petite phrase, en oubliant le reste.

Et c'est précisément là-dessus, sur le reste, que j'ai envie de me focaliser : l'intention de Peillon d'introduire dans les programmes scolaires un enseignement de la morale laïque.

Et moi de penser : "mais où diable va-t-il chercher tout ça ?". 

Parce qu'en plus, notre philologue pèche par manque de vocabulaire, ce qui est quand même grave.

Je suis, donc, allé jeter un oeil dans les archives, et j'ai déniché ceci :
Que signifie "éduquer à la citoyenneté" dans un système scolaire ? Deux réponses sont possibles. 
  • L’une consiste à faire de la citoyenneté un objet d’étude disciplinaire, au même titre que les mathématiques, la physique, la littérature etc. ; la citoyenneté s’apprendrait à l’école avant de s’exercer dans la vie du citoyen. Ce choix correspond pour l’essentiel à la conception traditionnelle d’une instruction civique, en tant qu’inculcation de principes à mettre en actes dans un temps différé plus ou moins lointain. Elle a eu sa place dans le système éducatif : les missions du lycée, fréquenté par une petite minorité, n’étaient pas celles qui lui sont assignées aujourd’hui. 
  • L’autre réponse part de l’idée que l’on ne naît pas citoyen mais qu’on le devient, qu’il ne s’agit pas d’un état, mais d’une conquête permanente ; le citoyen est celui qui est capable d’intervenir dans la cité : cela suppose formation d’une opinion raisonnée, aptitude à l’exprimer, acceptation du débat public. La citoyenneté est alors la capacité construite à intervenir, ou même simplement à oser intervenir dans la cité. Cette dernière réponse peut être mise en œuvre au lycée aujourd’hui. Deux conditions essentielles sont réunies : l’une correspond aux attentes des élèves telles qu’elles se sont exprimées au travers des consultations sur les savoirs ; l’autre s’inscrit dans la continuité de ce qui a été enseigné en éducation civique au collège, et permet de montrer les dimensions sociale, éthique et politique de certains savoirs enseignés au lycée. De nombreux professeurs ont exprimé leur intérêt pour cette démarche et leur désir d’y contribuer. 
Extrait du BO hors série n°6 du 29 août 2002

Nous étions, donc, en 2002 (août), soit quelques semaines ou mois après la déroute de la Gauche dite plurielle aux élections... Le président de la République s'appelle toujours Jacques Chirac, son premier ministre s'appelle Jean-Pierre Raffarin et le ministre de l'Éducation Nationale s'appelle Luc Ferry, et l'éducation à la citoyenneté, évoquée ici, va prendre corps sous la forme d'une matière enseignée dans tous les lycées de France et de Navarre - comme c'est déjà le cas dans les collèges - et baptisée E.C.J.S. (Éducation Civique Juridique et Sociale).

C'est dire si la proposition d'un enseignement de morale laïque faite par Peillon tombe bien à plat et relève d'un amateurisme assez navrant de la part de quelqu'un qui donnait pourtant l'impression d'avoir potassé ses dossiers. 

Si j'insiste tout particulièrement sur l'amateurisme de Vincent Peillon, c'est que j'ai des souvenirs tout frais de cours d'E.C.J.S. dispensés dans des établissements scolaires où j'ai officié. Et j'ai précisément le souvenir d'exposés effectués par les élèves sur toutes sortes de sujets : le harcèlement sexuel, les signes religieux en milieu scolaire, la drogue..., et qui dit exposé dit souvent débat, et ceux auxquels j'ai assisté ne manquaient pas d'intérêt. Voilà qui me permet d'affirmer, ici, que la proposition de Vincent Peillon sur un enseignement de la morale laïque revient à enfoncer des portes ouvertes ou à inventer le robinet d'eau tiède, ou encore à parler pour ne rien dire. Parce que, entre nous, à moins de vouloir inventer une discipline particulière et tout à fait inédite, habillée sous le label "morale laïque", je ne vois pas très bien en quoi cet enseignement se distinguerait de l'E.C.J.S.

Et, pour enfoncer le clou, j'ai retrouvé dans mes archives personnelles un vieux manuel d'éducation civique pour la classe de 4ème, année 1997, que je reproduis ci-dessous.











Les extraits qui précèdent en disent long sur ce qui est déjà enseigné au collège et au lycée ; comme quoi, qu'on l'appelle "morale laïque", "civisme" ou "droit", la discipline est déjà présente dans l'institution scolaire. Vincent Peillon aurait mieux fait de se tenir au courant avant de se laisser aller à blablater n'importe quoi dans les micros !