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samedi 31 décembre 2016

Marine Le Pen et le plafond de verre. Épisode 5


L. A. (no)confidential

Fin août 2016, Emmanuel Macron est sur le point de quitter son ministère de l'Economie. Je saute sur l'occasion pour lui adresser un courrier, dont je reproduis, ci-dessous, les passages les plus significatifs.
Monsieur le Ministre,
À vrai dire, ce n’est pas au ministre que je m’adresse, mais au responsable politique. 
Pour ne rien vous cacher, moi, qui suis un fervent adepte de la pensée de gauche – pas la gauche bonapartisée (le bonapartisme est un concept de droite !) des Mitterrand, Rocard, Jospin, Chevènement… voire Montebourg, ni la gauche dogmatique et ringarde des marxistes-léninistes et autres trotskistes –, j’en suis venu à penser que la seule chose qui pourrait engager durablement le redressement de la France, ce serait un tsunami, qui pourrait prendre la forme d’une victoire de Marine Le Pen à la prochaine présidentielle. 
En attendant, je vous observe et constate que vous n’avez encore rien dit d’essentiel, à l’instar de la totalité des responsables politiques de ce pays, sauf un : Louis Aliot. Oui, le Louis Aliot du Front National, à qui j’ai écrit pour le féliciter d’avoir dit quelque chose d’essentiel… 
(…)
Le fait est que, près de trois mois plus tôt, j'écoute plus ou moins distraitement sur une radio-télévision française (RMC/BFMTV) une interview matinale conduite par le journaliste Jean-Jacques Bourdin. Je dois avouer que je ne suis pas friand de ce genre d'interview, notamment en raison de l'extrême spécialisation de cette catégorie de journalistes, qui semblent n'avoir pour seuls interlocuteurs valables que les responsables politiques, et tant pis pour les universitaires, les chercheurs, les chefs d'entreprises, les artistes, compositeurs, architectes, etc, dont la France compte quelques spécimens prestigieux (cf. on inaugure incessamment un "Louvre d'Abou Dhabi" dont le concepteur, le très imaginatif Jean Nouvel, brille par son absence dans les médias français, à l'instar de tous ses collègues architectes !). Autant dire qu'en temps normal, j'aurais rapidement zappé. Mais il se trouve que l'invité de Bourdin, ce jour-là, est un responsable du Front National ne brillant pas (contrairement à l'envahissant Florian Philippot) par son omniprésence dans les médias.

J’écoute, donc, l’échange entre Bourdin et Aliot lorsque j'entends ce dernier déclarer textuellement ceci : « Nous sommes pour une république qui fasse directement appel au peuple sur les grands sujets…, notamment via le referendum d’initiative populaire. »

Et là, je sursaute : « qu’est-ce qu’il a dit ? Il faut absolument que tu le notes ! ».

Je note soigneusement les propos d'Aliot, en me promettant de féliciter son auteur, lequel a promptement accusé réception, comme preuve qu'il y a des gens bien élevées au Front National.

J'observe, par ailleurs, que quelques semaines ou mois plus tard, Marine le Pen, présidente du Front National, était interrogée, sur la même chaîne de télévision (BFMTV) par la journaliste Appoline de Malherbe, et s'est, à son tour, prononcée en faveur d'une instauration du referendum d'initiative populaire.

Aliot d'abord, Le Pen ensuite, et moi de penser : "en voilà une grande idée !".

Ainsi que je l'affirmai dans un précédent article, je considère qu'une grande idée vaut mieux que cinquante petites, raison pour laquelle je ne comprends pas, mais alors, pas du tout, pourquoi certains responsables du FN, à commencer par Marine Le Pen elle-même, manifestent un si malin plaisir à noyer une grande idée dans une myriade de petites !

Et il n'y a pas que le Front National !

Je me faisais la même réflexion à propos de Norbert Hofer ; vous savez ? la (mauvaise) "gravure de mode" que le F.P.Ö. autrichien s'est choisie pour le représenter à la dernière présidentielle : beaucoup de blablabli-blablabla dans son programme, mais rien d'essentiel !

Il se trouve que je connais un peu l'Autriche, ses sublimes paysages alpestres, ses villages si attachants, un des meilleurs laits frais du monde, bu dans une auberge, quelque part dans le Vorarlberg, le Salzkammergut et ses petits lacs de montagne, la fameuse 'Auberge du cheval blanc', la capitale, Vienne, restée si délicieusement désuète depuis la Grande Époque, et depuis l'assassinat de Sissi..., et surtout, Salzburg, que j'ai découverte lors d'un séjour linguistique, du vivant d'Herbert von Karajan, que j'ai eu le plaisir de découvrir en chair et en os, sur scène, donc, un soir, depuis un fauteuil d'orchestre du Großes Festpielhaus, et pour pas un schilling - cf. billet gracieusement offert par les Affaires culturelles de la Ville et du Land de Salzburg -, le tout, lors de la toute première apparition publique d'une adolescente toute menue, jouant divinement du violon : Anne-Sophie Mutter. 

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C'est dire si ce petit pays, propre et à la population particulièrement cultivée ["Gestern war ich bei der Zauberflöte." /"Hier, je suis allé voir la Flûte enchantée.", me déclara, un soir, devant le zinc d'un bistrot, un chauffeur de taxi.] me tient particulièrement à coeur, pays que des bureaucrates de l'Union Européenne ainsi qu'une certaine mafia internationale aimerait voir intégrer, par dizaines de milliers, des abrutis amenés là par une clique de gangsters spécialisés dans le trafic d'esclaves vers l'Europe. Et le fait que beaucoup de ces abrutis soient africains, comme moi-même, ne change strictement rien à l'affaire, bien au contraire : si j'avais été Autrichien, j'aurais certainement voté Hofer, tout en regrettant le caractère évasif et édulcoré de son programme.  

Et dire que le candidat du F.P.Ö. avait devant lui un boulevard, étant donnée la résistance - que je partage, donc - d'une majorité d'Autrichiens face aux invasions barbares qui menacent leur petit pays !

Voilà qui nous ramène à ma marotte, à savoir le fameux "plafond de verre" stigmatisant certains partis dits d'"extrême-droite", plafond dont je continue d'affirmer que, la plupart du temps, on se le fabrique soi-même.

Rappelons, en passant, que le FPÖ a déjà connu un "brillant" représentant, en la personne de feu Jörg Haider. Et, à l'époque, il n'était pas question de présidentielle mais de l'élection la plus importante, celle qui désigne le chancelier. Et le moins que l'on puisse dire est que les partis "bourgeois" autrichiens ne sont pas sortis de l'auberge, eux qui semblent condamnés, pour un bon bout de temps encore, à cet accouplement artificiel qu'est la grande coalition, à l'instar de leurs voisins allemands.

Néanmoins, pour ce galop d'essai avant les futures législatives, j'estime qu'il a manqué au programme du F.P.Ö. une idée toute simple, sur laquelle aucun(e) électeur/trice n'aurait craché : l'instauration du referendum d'initiative populaire, véritable arme de dissuasion massive contre cette Europe dirigée depuis Bruxelles par des bureaucrates apatrides, et sans qu'il soit besoin de s'exclure de l'Union Européenne !

Imaginez, un instant, la petite Autriche se dotant du referendum d'initiative populaire et l'effet "boule de neige" qui s'en suivrait à travers l'ensemble de l'Union Européenne, tous les peuples manifestant leur adhésion à une procédure que les Suisses pratiquent depuis la nuit des temps.

Du coup, j'en viens à m'interroger sur la répulsion de tant de mouvements politiques à l'égard de la démocratie directe, en ces temps où les nouvelles technologies de l'Information rendent tout à fait possible la consultation rapide et instantanée de populations entières ; voyez les centaines de milliers de connections instantanées des téléspectateurs lors d'une élection comme celle de Miss France !

Petit retour en arrière : présidentielle française de 2007, programme de Ségolène Royal tenant en 100 propositions.
 


J'avoue avoir été surpris, pour ne pas dire déçu, de voir que la fameuse "démocratie participative", largement brandie, à l'époque, par Ségolène Royal, ne débouche que sur un article à la formulation bizarroïde et noyé au numéro 73 (sur cent articles).

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Par parenthèse, on rappellera qu'en 2007, Ségolène Royal plaidait déjà pour l'abrogation de l'article 49-3 de la Constitution (cf. proposition n° 71).

Il n'empêche que l'"usine à gaz" de la proposition n° 73 aurait pu être formulée de manière plus limpide. D'abord, conformément à une doctrine que je revendique volontiers, une grande idée valant mieux que cinquante (quatre-vingt-dix-neuf !) petites, moi, contrairement à Ségolène Royal, j'aurais énoncé le principe du referendum d'initiative populaire dès l'article 1 de mon programme, la suite n'étant qu'une déclinaison de ce principe fondateur, ce qui pourrait se résumer en l'articulation suivante :

1. Quel État ?, et...
2. Pour quoi faire ?

En clair : 1. quel État ? Un État authentiquement démocratique, au sens étymologique du terme, donc définitivement débarrassé des miasmes de l'autocratie gaulliste (n. b. fort curieusement, le programme de Ségolène Royal n'évoquait à aucun moment le sulfureux article 16 de la Constitution !).

2. Pour quoi faire ? Ben tout le reste, le peuple étant l'alpha et l'oméga de toute décision politique, dans une démocratie qui se respecte.

Dommage que Ségolène Royal ait eu à ce point peur d'une démocratie directe qu'elle semblait pourtant appeler de ses voeux. Le fait est qu'en 2011, Royal avait purement et simplement décidé de balancer aux orties sa fameuse démocratie participative. Funeste initiative !

C'est dire si je suis fort curieux de voir comment Marine Le Pen et son parti vont s'y prendre, je veux dire quelles vont être les contorsions auxquelles elle et son parti vont devoir se soumettre, pour ne pas afficher, bien haut (= tout en haut !) leur nouvelle devise "Au nom du peuple", concrétisée par le principe qui veut que c'est le peuple qui décide en premier et en dernier ressort !

Alors, rêvons un peu, et imaginons une Marine Le Pen apparaissant tantôt devant les zadistes de Notre-Dame-des-Landes, et leur annonçant que "moi présidente, les habitants des plus petits patelins de France et de Navarre ne seront plus mis devant le fait accompli par l'Administration, mais disposeront d'un droit de veto contre toute installation impactant leur territoire, de même que les Parisiennes et les Parisiens auront leur mot à dire face aux oukases de la maire de Paris, avec ses projets extravagants, visant, par exemple, à saccager les serres d'Auteuil pour juste deux semaines d'un tournoi de tennis à Roland Garros, histoire de satisfaire aux caprices d'une fédération (F.F.T.) incompétente et sans imagination,  de même que ladite maire de Paris ne pourra plus disposer, sans que le peuple ne soit consulté, de la circulation automobile sur les voies sur berges, de même que les dizaines de millions de téléspectateurs de ce pays ne se verront plus privés d'un animateur apprécié ou d'une émission devenue "culte" sur le simple bon vouloir d'un(e) petit(e) dictateur/trice placé(e) à la tête d'une des chaînes de l'audiovisuel public, de même que les journalistes et personnels de tel organe dudit audiovisuel public pourront opposer leur veto à la nomination ou à la poursuite de l'activité de telle directeur/trice des programmes ou directeur/trice de l'information...".

Pour l'heure, j'observe, en tout cas, que les seules personnes ayant publiquement évoqué la question du referendum d'initiative populaire, sont deux "huiles" du Front National, Louis Aliot et Marine Le Pen. Pendant ce temps, sur le reste de l'échiquier de la prochaine présidentielle, rien, nichts, nada, nothing, notamment du côté de ceux qui veulent "casser baraque" (F. Fillon) ou mettre fin à un "système dont ils ont pu constater la vacuité" (cf. E. Macron), un Emmanuel Macron que je persiste à trouver bien imprudent et pétri de fatuité, tant son discours est désincarné et insipide !

Imaginez, un peu, une corporation (les journalistes de l'audiovisuel public) ou des groupes de pression (les zadistes et autres écologistes radicaux) appelant à voter pour Marine Le Pen lors de la prochaine présidentielle, car seule candidate susceptible d'instaurer un principe qu'ils appellent de leurs voeux depuis des lustres : le referendum d'initiative populaire !
 
Le monde à l'envers !?

Prochainement : Le plafond de verre ! Quel plafond de verre ?